Stephan Zweig fait parti de mes auteurs fétiches ! Tout ces écrits sont extraordinaires. On vit ses histoires, chaque personnages nous plongent dans une aventure que nous pourrions vivre. Ces descriptions sont fabuleuses ! "Vingt quatre heure de la vie d'une femme" en est un super exemple. Je partage avec vous et vous conseille si vous ne connaissez pas de lire ce petit chef- d'œuvre.
« Ces deux mains frémissantes, haletantes, comme essoufflées… » (extrait)
« Ces deux mains frémissantes, haletantes, comme essoufflées… » (extrait)
« Ces deux mains frémissantes, haletantes, comme essoufflées… » (extrait)
« Pendant un moment, elles restèrent étendues toutes les deux sur le tapis vert, telles des méduses échouées sur le rivage, aplaties et mortes. Puis l’une d’elles, la droite, se mit péniblement à relever la pointe de ses doigts ; elle trembla, elle se replia, tourna sur elle-même, hésita, décrivit un cercle et finalement saisit avec nervosité un jeton qu’elle fit rouler d’un air perplexe entre l’extrémité du pouce et celle de l’index, comme une petite roue. Et soudain cette main s’arqua comme une panthère faisant le gros dos, et elle lança ou plutôt elle cracha presque le jeton de cent francs qu’elle tenait, au milieu du carreau noir. Tout de suite, comme sur un signal, l’agitation s’empara aussi de la main gauche qui était restée inerte : elle se réveilla, glissa, rampa même, pour ainsi dire, vers sa soeur toute tremblante que son geste semblait avoir fatigué, et toutes deux étaient maintenant frémissantes l’une à côté de l’autre : toutes deux, pareilles à des dents qui dans le frisson de la fièvre claquent légèrement l’une contre l’autre, tapotaient la table, sans bruit, de leurs jointures. Non, jamais, jamais encore, je n’avais vu des mains ayant une expression si extraordinairement parlante, une forme d’agitation et de tension si spasmodique. Sous cette grande voûte, tout le reste, le murmure qui remplissait les salons, les cris bruyant des croupiers, le va-et-vient des gens et celui de la boule elle-même, qui maintenant, lancée de haut, bondissait comme une possédée dans sa cage ronde au parquet luisant, -toute cette multiplicité d’impressions s’enchevêtrant et se succédant pêle-mêle et obsédant les nerfs avec violence, tout cela paraissait brusquement mort et immobile à côté de ces deux mains frémissantes, haletantes, comme
essoufflées, en attente, grelottantes et frissonnantes, à côté de ces deux mains inouïes qui me fascinaient quasiment et accaparaient toute mon attention."
Stefan Zweig, né le 28 novembre 1881 à Vienne, en Autriche-Hongrie, et mort par suicide le 22 février 1942, à Petrópolis au Brésil, est un écrivain, dramaturge, journaliste et biographe autrichien.
« Pendant un moment, elles restèrent étendues toutes les deux sur le tapis vert, telles des méduses échouées sur le rivage, aplaties et mortes. Puis l’une d’elles, la droite, se mit péniblement à relever la pointe de ses doigts ; elle trembla, elle se replia, tourna sur elle-même, hésita, décrivit un cercle et finalement saisit avec nervosité un jeton qu’elle fit rouler d’un air perplexe entre l’extrémité du pouce et celle de l’index, comme une petite roue. Et soudain cette main s’arqua comme une panthère faisant le gros dos, et elle lança ou plutôt elle cracha presque le jeton de cent francs qu’elle tenait, au milieu du carreau noir. Tout de suite, comme sur un signal, l’agitation s’empara aussi de la main gauche qui était restée inerte : elle se réveilla, glissa, rampa même, pour ainsi dire, vers sa soeur toute tremblante que son geste semblait avoir fatigué, et toutes deux étaient maintenant frémissantes l’une à côté de l’autre : toutes deux, pareilles à des dents qui dans le frisson de la fièvre claquent légèrement l’une contre l’autre, tapotaient la table, sans bruit, de leurs jointures. Non, jamais, jamais encore, je n’avais vu des mains ayant une expression si extraordinairement parlante, une forme d’agitation et de tension si spasmodique. Sous cette grande voûte, tout le reste, le murmure qui remplissait les salons, les cris bruyant des croupiers, le va-et-vient des gens et celui de la boule elle-même, qui maintenant, lancée de haut, bondissait comme une possédée dans sa cage ronde au parquet luisant, -toute cette multiplicité d’impressions s’enchevêtrant et se succédant pêle-mêle et obsédant les nerfs avec violence, tout cela paraissait brusquement mort et immobile à côté de ces deux mains frémissantes, haletantes, comme
essoufflées, en attente, grelottantes et frissonnantes, à côté de ces deux mains inouïes qui me fascinaient quasiment et accaparaient toute mon attention."
Stefan Zweig, né le 28 novembre 1881 à Vienne, en Autriche-Hongrie, et mort par suicide le 22 février 1942, à Petrópolis au Brésil, est un écrivain, dramaturge, journaliste et biographe autrichien.